L’évolution de la réalité virtuelle dans l’immobilier

L'évolution de la réalité virtuelle dans l'immobilier

La réalité virtuelle, nouvel allié de l’immobilier

Longtemps cantonnée au domaine du jeu vidéo ou de la formation immersive, la réalité virtuelle (VR) fait aujourd’hui une percée remarquée dans des secteurs que l’on n’aurait pas soupçonnés il y a encore dix ans. L’immobilier est de ceux-là. Entre visites virtuelles, modélisation 3D en temps réel et projection personnalisée de biens, la VR redistribue les cartes d’un secteur pourtant historiquement peu disruptif. Mais que se cache-t-il concrètement derrière cette tendance ? Le décor ne se limite pas à un casque sur la tête. Il s’agit d’un changement de paradigme dans la manière de concevoir, commercialiser et expérimenter l’acte immobilier.

De la prospection à la projection : un parcours transformé

Jusqu’ici, acheter ou louer un bien immobilier impliquait de nombreuses (et parfois fastidieuses) visites physiques. Or dans un contexte où le temps est devenu un luxe et où la demande dépasse souvent l’offre, cette méthode perd en efficacité. C’est ici que la réalité virtuelle offre une alternative puissante : permettre au futur acquéreur ou locataire de se projeter dans un bien sans y mettre un pied.

Les agences immobilières, souvent en retard sur les innovations technologiques, commencent à intégrer la VR pour élargir leur spectre de services. Elles proposent désormais des visites virtuelles guidées, interactives et en haute définition. Le principe est simple : en enfilant un casque VR, le client peut se « promener » dans un appartement ou une maison comme s’il y était vraiment. Et ce, où qu’il se trouve dans le monde. En 2023, une étude menée par Matterport révèle que les acheteurs passent 5 à 6 fois plus de temps sur une annonce intégrant une visite virtuelle que sur une annonce classique.

Ce type de solution est particulièrement efficace pour les programmes immobiliers neufs. Aucune structure n’existe encore ? Qu’à cela ne tienne : la VR permet d’explorer un futur bâtiment modélisé en 3D, jusque dans les moindres détails. Sols, revêtements muraux, luminosité à différentes heures du jour… tout peut être ajusté en temps réel pour coller au plus près des attentes de l’utilisateur.

Un nouveau levier pour les promoteurs immobiliers

Le marché du neuf est naturellement orienté vers les technologies VR. Pour les promoteurs, cela signifie une possibilité précieuse : vendre sur plan sans faire appel uniquement à l’imaginaire du client. Grâce à des environnements immersifs détaillés, ces derniers peuvent explorer des appartements témoins virtuels, comparer différentes configurations ou même tester des options de mobilier et de design intérieur.

À la clé ? Une prise de décision plus rapide et mieux informée. Un promoteur basé à Lyon, avec lequel j’ai échangé récemment, m’a expliqué qu’en introduisant des visites VR dès la phase de pré-commercialisation, il avait réduit de 40 % la durée moyenne de vente de ses biens. La réalité virtuelle devient alors un outil stratégique, permettant non seulement d’améliorer l’expérience client mais aussi de fluidifier les opérations commerciales.

La VR au service de la rénovation et des architectes

La révolution ne s’arrête pas aux biens neufs. Les projets de rénovation ou de réhabilitation profitent eux aussi grandement de l’essor de la VR. Pour les architectes, c’est un nouveau terrain de jeu. Plutôt que de s’en remettre aux traditionnels plans 2D, ils peuvent aujourd’hui concevoir des maquettes numériques immersives qui parlent une langue universelle : celle de la visualisation directe.

Imaginez un client hésitant entre un réaménagement de cuisine ouverte ou une cloison vitrée design… plutôt qu’un croquis ou une simulation 2D, il chausse un casque et expérimente les deux versions comme s’il y était. En quelques minutes, les doutes s’estompent, les arbitrages se précisent, les décisions se consolident.

Un gain de temps… mais aussi de coûts

Si l’aspect spectaculaire de la VR attire l’attention, c’est avant tout sa rentabilité qui séduit les professionnels. En réduisant les besoins de déplacements, en diminuant le nombre de visites physiques non concluantes, en accélérant les cycles de vente et en limitant les erreurs de projection, la technologie gagne rapidement en ROI.

Voici quelques bénéfices concrets souvent constatés chez les professionnels de l’immobilier :

  • Réduction des visites physiques de 60 à 70 %.
  • Cycle de décision client accéléré de 30 à 50 %.
  • Hausse du taux de transformation des annonces incluant une visite VR (+25 % d’après Inman, 2022).
  • Diminution des coûts de commercialisation pour les programmes neufs (moins de showrooms physiques nécessaires).

Ajoutez à cela le gain en confort et en efficacité pour les clients : plus besoin de prendre un jour de congé pour faire cinq visites dont quatre s’avèrent décevantes.

Et côté utilisateurs ? Une expérience repensée

Pour les acquéreurs et investisseurs, la VR représente une montée en gamme de l’expérience immobilière. Elle réduit le stress lié à l’achat, permet de mieux anticiper son futur environnement et renforce le sentiment de confiance. Les applications mobiles de visites immersives se démocratisent. Il n’est donc même plus nécessaire d’investir dans un matériel coûteux : une simple visionneuse de type cardboard et un smartphone suffisent pour accéder à une expérience réaliste et engageante.

Les nouveaux outils de réalité virtuelle intègrent souvent des options de personnalisation avancées : modification de l’ameublement, simulation de la luminosité, test de différents revêtements… autant d’éléments qui transforment l’utilisateur passif en acteur de son choix.

Des leviers différenciants pour les agences innovantes

On observe un net clivage sur le terrain : les agences traditionnelles qui peinent à suivre, et celles qui intègrent la VR à leur ADN. Cette technologie devient un excellent facteur de différenciation. Une agence ayant investi dans un studio VR ou collaborant avec des prestataires spécialisés peut proposer une expérience qui dépasse largement la simple mise en relation vendeur/acheteur.

Les plus innovants vont plus loin : certaines plateformes immersives, comme Spatial ou Arkio, permettent désormais à plusieurs utilisateurs de visiter ensemble un bien en réalité virtuelle, à distance. Imaginez un couple installé à Paris, leurs parents à Marseille et le bien à visiter à Nantes : tous peuvent s’y retrouver, casque VR sur la tête, et échanger « dans » le bien comme s’ils y étaient physiquement. Une forme de co-décision à distance qui reflète les nouveaux usages numériques.

Entre innovation technologique et enjeux de formation

Toutefois, pour transformer l’essai, une montée en compétence des professionnels est indispensable. Posséder une visite 3D ne suffit pas : il faut savoir la mettre en scène, expliquer son fonctionnement, rassurer les utilisateurs parfois peu familiers avec cet univers.

Sans accompagnement, la meilleure des expériences immersives peut rester lettre morte. C’est pourquoi certaines écoles d’agents immobiliers intègrent désormais une formation dédiée à la VR dans leur cursus. D’autres font appel à des consultants spécialistes pour co-construire de véritables parcours d’usage, ergonomiques et centrés sur le client.

Et demain, quelle réalité pour la réalité virtuelle immobilière ?

De plus en plus performante, portable et intégrée dans les logiciels de modélisation 3D, la réalité virtuelle promet encore de belles révolutions. Avec l’arrivée massive des casques autonomes, plus besoin de PC puissants ni de câblage complexe. D’ici 2026, on estime que plus de 70 % des promoteurs immobiliers en Europe intègreront la VR à leur cycle de vente, contre 35 % aujourd’hui (source : Deloitte Digital Report, 2023).

Les prochaines étapes ? L’intégration de l’intelligence artificielle à la VR permettra de générer automatiquement des plans personnalisés ou de recommander des agencements en fonction du profil de l’utilisateur. La réalité mixte (VR + réalité augmentée) pourrait, elle, permettre de projeter des éléments 3D directement dans un espace réel, rendant la frontière entre monde virtuel et monde physique de plus en plus poreuse.

Loin d’être un gadget spectaculaire, la VR s’impose progressivement comme un outil stratégique, capable de répondre aux exigences croissantes d’un marché immobilier en pleine transformation. Pour les acteurs qui sauront l’embrasser avec clairvoyance, elle deviendra bien plus qu’un atout marketing : un véritable levier de croissance et de différenciation.

Anne Leclerc